samedi 9 octobre 2021

Narcisse

Un jardin dans ma vie est chose capitale. Je n'y compte mes heures et le laisse advenir selon ses volontés. Je reconnais, parfois nous sommes en désaccord. Chacun sa propre vie et nous nous respectons. Chacun donne et reçoit. J'aime les floraisons, surprenantes beautés. Toutes n'apportent pas égale volupté, c'est bien cela la vie. Le jardin est rempli de petites coquettes, de grands beaux efflanqués. Narcisse est séducteur, comme tant d'autres fleurs.

Je connais un narcisse (Nartsiss Munira Petula) exécrant le bouquet. Il accepte assez mal la présence de sœurs qu'il a tôt fait, vicieux, d'étouffer, de tuer. Lot des rivalités. Ce fier narcisse et moi tâchons quand c'est possible de ne plus commercer. Ce gars-là est toxique. De cela je suis sûr.

*

Au jardin de ma vie je découvre, ébranlé, que ce seul exemplaire (Nartsiss Munira Petula) possèderait, qui sait, un pouvoir maléfique. Et si je l'interroge voilà qu'il me répond "tu ne peux inventer de telles médisances, je ne fais que porter ma beauté pour te plaire". Nartsiss Munira Petula, un chef en diversion ou peut-être un menteur, qui sévirait, rumeurs, en dehors des jardins ? Il aime qu'on l'admire, fait tout pour être vu. Et s'il peut nous séduire, ce sont ses mots alors qui nous éblouiront, captureront nos vies. Tout cela selon lui, pour notre plus grand bien. Faire ce qu'il ambitionne, son bonheur assuré. Et son plus grand plaisir, c'est nous faire payer chaque pas de côté ! A la moindre lacune, à chaque hésitation, nous devenons la proie. Alors, ô jouissance, il nous déstabilise, distille son pouvoir tel un fourbe vaccin. Pour notre bien, s'entend. Il nous sera dédié pour peu que l'on le suive. Il soigne son feuillage, il est irréprochable, vous dirait comment faire pour paraître, avoir l'air et s'il trouvait vos mots vraiment trop ordinaires, il porterait sans peur, le frac académique.

Diantre, au cœur du bouquet, c'est l'émoi et le drame. Celles qu'il a charmées, ceux qu'il a enjôlés roses tendres et bleuets, graminées et branchages fanent et puis dépérissent, se paralysent et gâtent. Il est dit que Nartsiss s'enorgueillit, royal, au rythme de nos ruines.

Cette fleur de printemps ne fait foi de ciel bleu ! Si dans notre jardin, au fond de nos parterres sommeillent des narcisses vérifions qu'ils ne sont de cette confrérie, Munira Petula. Nartsiss en son discours lentement, patiemment nous berne, abuse et trompe puis enfin débâtit. Nartsiss dont rien n'exhale comme un parfum pourtant lentement empoisonne.

"Toi tu réfléchis trop, viens donc je peux t'aider… Tu es bien trop sensible, allez, fais-moi confiance… Si vraiment tu m'écoutes, confiance, ça va aller… C'est toi qui tout inventes… Suspicion dans ta tête… Moi te vouloir du mal…"

*

J'aime bien les narcisses. Et j'aime, également, les fleurs de nos jardins, beautés sans prétention qui sans arrière-pensées embellissent la vie, heureuses d'être là entourées des semblables. Le jardin dans ma vie est un hôte de choix. Je n'y compte mes heures et le laisse advenir. Un morceau de bonheur. Une beauté gratuite.

 

© andré elleboudt


Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Astre

Aux abonnés absents depuis beaucoup de lunes le soleil, ce seigneur, fit subir aux humains la nuit. Révolution! ...