dimanche 29 mai 2016

Pas possible

Le silence assombrit le gazouillis parfait
de la pluie sur le banc.
Un nuage en transit emmitoufle de joie
l'éveil d'un vieux chevreuil.
Sur le haut du pommier, la merlette édulcore
des versets du coran.
A l'abri du clocher, cachée derrière un gong,
la nonne étend des draps.
Au milieu du salon, un père enfariné
éduque un lévrier.
Au-delà des îlots, un amphibien curieux
déplie un vieil atlas.
Découvrant le café, un fermier audacieux
trait le feu d'un dragon.
Un dieu dans son dressing consulte le patron
d'un tailleur de caillasse.
Une imprimante à plumes s'essaie à un roman
racontant l'écriture.
Au bout de l'autoroute, un cachalot se meut
entre deux buffets froids.
L'agenda étudie la complainte des jours
et lit la météo.
Ainsi s'en vont les jours au pays du permis
où tout se veut possible.


© andré elleboudt

vendredi 27 mai 2016

Goutte

Inscrit à l'eau tiède et rancie,
la goutte épaisse portait en elle
la misère anonyme et dure
d'un monde où être différent
ne pouvait habiter: sombrer.


© andré elleboudt

vendredi 20 mai 2016

Contrebasse



L'ombre sur la portée donnait aux notes noires
un éclat étonnant sur le papier jauni.
Quand la croche évita un silence égaré
c'est tout l'oratorio qui divagua, heureux.
Les instruments surpris réalisèrent en chœur
que le free jazz anglais recelait de saveurs
inconnues jusqu'alors, dark ale, gherkin, meat pie.
Quittant tous l'odéon, ils embarquèrent pintés
dans l'étui très noirci de dame contrebasse.
Le solfège accueillit cette troupe foldingue
qui, tout de go, tonna un requiem joyeux.
Quand l'ombre disparut au coucher du soleil
chacun se demanda s'il avait bien rêvé.

© andré elleboudt

samedi 14 mai 2016

Mots

Tes mots se sont cassés
dans le ton de ta voix.

Je les croyais partis,
ils n'étaient que brisés.
Appréhender le sens
d'un mot articulé
par l'un ou l'autre esprit
est question délicate.
Car à côté du son,
du regard, de la voix,
il demeure un mystère:
cela que je veux dire.


© andré elleboudt

jeudi 5 mai 2016

Crayon gras

J'ai saisi dans les doigts 
le crayon gras du temps. 
J'y ai mis tout le cœur 
quand j'ai tracé des mots.
Là-bas, au fond de moi 
j'ai vu d'anciens serments. 
J'ai revu les ardeurs 
de la vie, de ses flots.
Ils parlaient d'autrefois 
quand déjà, espérant, 
je me voyais barreur. 
Je n'étais que rafiot.
Au défilé des voies, 
de plaines en étangs, 
je me voulais lutteur. 
Je me suis vu nabot.
J'ai convoqué ma joie. 
Elle allait là, errant, 
entre peine et douceur. 
Puis j'ai biffé des mots.

© andré elleboudt

dimanche 1 mai 2016

Buissonnier

 
 
Car je voulais t'aimer! J'allais te le montrer.
Je pensais 'c'est gagné', j'allais échafauder.
J'ai vécu avec toi et découvert, ma foi,
que tu n'étais pas moi. J'en suis resté pantois.
En t'aimant aujourd'hui j'ai oublié celui
qui se croyait instruit parlant d'amour tout cuit.
Et alors je me tais, j'observe car tu me fais
un dessein où se crée notre amour buissonnier.

© andré elleboudt

Astre

Aux abonnés absents depuis beaucoup de lunes le soleil, ce seigneur, fit subir aux humains la nuit. Révolution! ...